Jan de Haas, de la zone à la paroisse

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Jan de Haas, de la zone à la paroisse

10 février 2005
Devenu célèbre par travail d'aumônier dans les rues, sans cesse sollicité durant de nombreuses années, Jan de Haas se retrouve désormais à Moudon, loin des caméras et des marginaux de Lausanne
Rencontre avec cet éternel révolté, qui continue de privilégier la relation vraie. Depuis une dizaine de mois, pour Jan de Haas, un « bonjour, Monsieur le pasteur » a remplacé l’habituel apostrophe « Eh salut Jan ! ». Le célèbre aumônier des rues lausannoises officie désormais au sein de la paroisse de Moudon, loin des projecteurs, à l’ombre de la très belle église Saint-Etienne. Et naturellement, ce perpétuel indigné fourmille déjà de projets pour la vénérable et superbe bâtisse,qu'il juge fort mal aménagée. " On va disposer les chaises de manière moins austère, en rond par exemple. Et créer à l’entrée un espace pour les pèlerins de Compostelle. Ils sont nombreux à passer par ici ».

Au coeur de l’actualité durant les années 90, le créateur d’une pastorale des rues qui fait désormais école à Neuchâtel (lire notre article no 819) se retrouve donc en pleine Broye vaudoise, bien loin de la zone de Saint-Laurent et à l'abri des grands titres de la presse. « Avant de travailler parmi les marginaux, j’ai été pendant 4 ans à Chavannes-près-Renens, puis une décennie à la Pontaise. La réalité d’une charge paroissiale ne m’était donc pas inconnue ». Privé de Lausanne pendant un anLorsqu’il quitte la « Pasto » en 2002, Jan de Haas tient parole : il ne mettra pas les pieds au centre ville de Lausanne durant une année, histoire de laisser ses successeurs prendre sa suite sereinement. « Aujourd’hui encore, on m’interpelle constamment quand je vais dans ce coin », reconnaît-il. Il s'engage à l’Entraide protestante (EPER) pour laquelle il va développer des projets de développement dans le Caucase pendant presque 2 ans. « Se confronter à la complexité du travail des oeuvres d’entraide était passionnant. Je me suis rendu notamment en Arménie mais aussi en Georgie. Puis c’est devenu plus administratif, et je sens mieux ma place dans les rapports directs ».

Il quitte donc l’EPER, après avoir déjà fonctionné pendant quelques mois comme formateur d’adultes à mi-temps dans l’est vaudois. « Le poste de mon collègue Serge Molla à Moudon se libérait. J’habite ici depuis 2001, j'y ai déjà vécu pendant mes études. Le Conseil de paroisse m’a demandé de prendre la suite et j’ai accepté ». Jan de Haas retrouve dans ce gros bourg très cosmopolite la problématique de l’asile, plusieurs familles des Balkans étant concernées par le dossier des renvois forcés. « La situation économique n’est pas facile, de gros employeurs sont partis, mais l’intégration de la population étrangère a toujours été un souci des autorités ». « Se montrer tel que l’on est »Evidemment, entre le catéchisme et la gestion des différentes activités paroissiales, Jan de Haas se retrouve assez loin d’une marge à fleur de pavé. « Dans la rue comme ici, la première utilité réside dans la rencontre avec autrui. L’importance d’une relation de qualité reste la même avec une vieille dame du groupe des aînés ou un jeune toxico. Alors même si le contexte est très différent, je fais ce que j’ai toujours fait : tenter de rejoindre les gens là où ils en sont, sans les juger ». Bien sûr, après des années de relations sans fioriture, le poids des convenances se montre parfois pesant, mais « lorsque les gens commencent enfin à se déplier, à se raconter, je me trouve alors face à des vies d’une incroyable richesse ».

On l’aura compris, les visites restent au centre de ses préoccupations, avec un Evangile vécu, mais pas brandi. « Je prie souvent avec l’un ou l’autre, mais cela doit rester un cadeau. Si c’est vécu comme un objectif, c’est fichu ». Entre deux salutations – la rue, à nouveau, paraît lui appartenir – Jan de Haas avoue qu’il se verrait bien achever son ministère à Moudon, en donnant vie à cette communauté. Avec la conviction que le pastorat demeure une magnifique aventure. « Vous en connaissez beaucoup de professions où l’on vous demande avant tout de vous montrer le plus vrai possible ? »