La visite du pape en Suisse a ravivé les tensions catholiques
4 juin 2004
Outre la querelle toujours vive qui oppose le Saint-Siège et les protestants concernant l’intercommunion, la venue de Jean-Paul II en Suisse le week-end dernier a ravivé les tensions entre le Vatican et les catholiques suisses
La Conférence des évêques, qui n'est pas à l’origine de la visite du Saint-Père, s’est ainsi retrouvée confrontée à une importante fronde interne. De nombreux fidèles catholiques ont en effet pris prétexte de l’événement pour réitérer deux demandes souvent formulées : l’abolition du célibat obligatoire des prêtres et la possibilité pour les femmes d’accéder à la prêtrise. En novembre dernier, le Synode catholique du Canton de Lucerne avait déjà réclamé ce type de réforme à la Conférence épiscopale, notamment en raison de la diminution drastique des vocations à la prêtrise. Au nom des évêques, son président, l'évêque de Coire Amédée Grab avait répondu qu'il n'appartenait pas aux évêques suisses de changer les lois ecclésiastiques, comme celle portant sur le célibat sacerdotal. En ce qui concerne les femmes prêtres, l'évêque avait réaffirmé la thèse exprimée en 1994 par Jean-Paul II: l'Eglise, par la volonté du Christ, ne peut admettre au sacerdoce que les hommes. En revanche, tout en relevant que le Synode de Lucerne n'avait pas l'autorité juridique de proposer les modifications annoncées, Mgr Grab assurait que les évêques suisses étaient disposés à s'engager en faveur de l'ordination des hommes mariés qui ont fait leurs preuves dans leur famille, leur profession et la communauté chrétienne.Les propositions du Synode de Lucerne - qui contrastent avec le magistère toujours défendu par le pape - ne sont pas isolées en Suisse: en fait, ceux de Saint-Gall, de Bâle-Campagne et de Thurgovie ont adopté les mêmes thèses. Par ailleurs, un sondage réalisé à la mi-mai dans la Suisse tout entière, par la « Fondation Herbert Haag pour la liberté de l'Eglise », a révèlé que 89% des catholiques suisses sont favorables à la liberté de choix concernant le célibat pour les prêtres, et 76% aux femmes prêtres. Selon ce même sondage, 90% des catholiques suisses sont favorables à l'intercommunion lors de cultes oecuméniques. Des résultats qui ont fait dire au théologien suisse allemand Hans Küng, l'un des oecuménistes catholiques les plus connus, président de la Fondation Haag : "Nous prions les évêques de prendre au sérieux les demandes du peuple ecclésial. Autrement ils se retrouveront vite sans peuple ».